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§584 Pie VII ayant soin de la famille de Napoléon (1814-1823): II-56.

II-56 (§584):

Que peste & glaive n'a seu definer,
Mort dans le puys sommet du ciel frappé:
L'abbé mourra quand verra ruiner,
Ceux du naufrage l'escueil voulant grapper.
(№ 3)

NOTES
: Definer: = « finir, terminer.» (Godefroy).

Que peste & glaive n'a seu definer: = [Celui] que peste & glaive n'a seu definer = celui que les guerres [peste & glaive] n’ont pas su terminer.

Que peste & glaive n'a seu definer, Mort dans le puys: = [Celui] que peste & glaive n'a seu definer [sera] mort dans le puys. Le personnage dont il s’agit dans ces vers serait Napoléon II, parce que l’expression particulière: « mort dans le puys » se réfère aux quatrains avec les semblables phrases le désignant toutes: « filz viendra plongé dedans le puis vif mort » (§555, X-15), « son filz submergé dans le puis » (§554, IV-53) et « L’enfant royal blessé au puy brises » (§556, I-65). En fait, Napoléon II avait été reconnu empereur des Français constitutionnellement à l’abdication de son père après la défaite à Waterloo en 1815, ce que les alliés ne veulent pas approuver et font restaurer les Bourbons: «  Les Chambres se prononcèrent d'abord, le 23 juin, pour Napoléon II, sans le proclamer toutefois, en reconnaissant simplement qu'il était devenu empereur « du fait de l'abdication et des Constitutions de l'Empire »... Quand cinq commissaires nommés par l'assemblée se présentèrent à Wellington pour discuter les conditions de la paix, le vainqueur leur déclara qu'il ne cesserait pas les opérations avant que Napoléon fût livré aux alliés et qu'un gouvernement régulier fût établi. Les commissaires ayant indiqué leurs préférences pour le duc d'Orléans, Wellington leur répliqua « que tout changement de dynastie était révolutionnaire », et obligerait les alliés « à chercher dans des concessions de territoire les seules garanties qui pourraient établir leur sûreté sur des bases solides ». Alors la Chambre n'essaya plus de diriger les événements; elle se mit à fabriquer une constitution. Les armées anglaise et prussienne arrivèrent le 30 juin devant Paris sans rencontrer d'obstacles. Après quelques combats d'avant-postes, Davout signa le 3 juillet la capitulation aux termes de laquelle l'armée française devait se retirer derrière la Loire avant huit jours. La Commission exécutive se déclara impuissante à gouverner, et disparut. La Chambre des pairs se sépara. La Chambre des députés voulut siéger quand même; Dessoles, un général rallié aux Bourbons, commandant de la garde nationale, envoya trente hommes occuper la salle de ses séances (8 juillet). Fouché restait seul: les alliés comprirent qu'il fallait compter avec lui. N'avait-il pas tout prévu depuis le 20 mars et tout mené depuis Waterloo? Le Roi réapparaîtrait sous la protection de ce régicide.» (Charléty, 1921, p.66-67).

Sommet
: Ce terme désigne Napoléon Ier par analogie avec ceux employés dans les vers en question: « Pere duc vieux d’ans & de soif chargé,... filz viendra plongé dedans le puis vif mort » (§555, X-15), « Le cruel pere & les siens suffoqués: son filz submergé dans le puis » (§554, IV-53) et « ... jamais veu si grand foudre: L’enfant royal blessé au puy brises » (§556, I-65).

Sommet du ciel frappé
: Napoléon Ier [sera] frappé du ciel: « [1813] Il étoit certain pour Napoléon, que depuis qu'il avoit retenu le Pape si étroitement prisonnier, la gloire des armes françaises avoit été en déclinant; le mariage avec Marie-Louise, en dépit de toutes les conséquences qu'il lui promettoit, n'étoit plus un bonheur; les flammes et les glaces de Moscow avoient répandu la consternation parmi les troupes les plus glorieuses de l'Europe, et anéanti cette armée si vaillante qui ne méritoit pas d'être si infortunée: l'on pouvoit pressentir que malgré les nouveaux sacrifices que la généreuse France consentoit à s'imposer, on n'alloit plus obtenir que les faux et incertains succès de Lützen, auxquels succéderoient les désastres de Leipsick. D'ailleurs personne n'ignore jusqu'à quelle foiblesse Napoléon étoit superstitieux pour tout ce qui tenoit à son étoile et à la continuation de sa prospérité.» (Artaud, 1839, p.58); « Napoléon continuoit d'être malheureux à la guerre. Malgré les efforts de son génie, malgré ses mouvemens rapides, ses brillans calculs, la France étoit envahie; la capitale alloit être investie... » (Artaud, id., p.81); « Le 11 avril [1814], Lucien Bonaparte écrivit d'Angleterre à Sa Sainteté une lettre où l'on remarque ces passages:
« Permettez-moi de féliciter du fond du cœur Votre Sainteté sur son heureuse et tardive délivrance, pour laquelle nous n'avons cessé de faire des vœux ardens depuis que la persécution nous a éloigné de l'asile dont nous jouissions sous votre protection paternelle... Quoique persécuté injustement par l'empereur Napoléon, le coup du ciel qui vient de le frapper ne peut pas m'être indifférent....».» (Artaud, 1839, p.83-84) = « Le divin mal surprendra le grand prince » (§488, I-88); « 1815. 31 juillet: L’Angleterre fait savoir à Napoléon que, le considérant comme prisonnier de guerre, elle le déporte à Sainte-Hélène.» (Bertaud, 1992, p.253).

Grapper
: = « graper, cueillir (des grappes de raisin); recueillir, s’emparer de.» (Godefroy).

L'abbé mourra quand verra ruiner, Ceux du naufrage l'escueil voulant grapper
: Le Pape Pie VII mourra quand il aura soin de la famille de Napoléon en détresse.

Quand verra ruiner, Ceux du naufrage l'escueil voulant grapper: « PIE VII, dont le nom était Grégoire Barnabé Chiaramonte, naquit à Césène, ville de la Romagne, dans les états romains, le 14 août 1740. ... Cependant toute l’Europe s’était liguée contre Napoléon... La chute de Napoléon rendit la liberté aux cardinaux dispersés dans plusieurs villes de la France, et ils vinrent se réunir au Saint-Père. Pie VII fit son entrée dans Rome, le 24 mai 1814, avec une pompe extraordinaire.... Mais l’heure du châtiment était arrivée. Napoléon, vaincu de nouveau par la coalition européenne, avait été forcé de faire une seconde abdication, et était tombé au pouvoir des Anglais, tandis que Murat, repoussé par les Autrichiens, s’était vu, de son côté, contraint de quitter un royaume où il ne revint que pour y trouver la mort... Le retour de Ferdinand IV dans son royaume de Naples, et les talents diplomatiques que déploya le cardinal Consalvi auprès des souverains réunis au congrès de Vienne (du Ier novembre 1814 au 9 juillet 1815), firent rendre au Saint-Père, non seulement Ancône et ses Marches, Bénévent et Ponte-Corvo, mais les trois légations de Bologne, Ravenne et Ferrare, qu’il avait été obligé de céder par le traité de Tolentino. De retour dans sa capitale, après avoir fait un court séjour à Turin, pour céder aux instances du roi de Sardaigne, Pie VII donna de nouveau ses soins aux affaires temporelles et spirituelles de ses états... » (Feller7E, s.v.).

« Le 11 avril [1814], Lucien Bonaparte [... Lucien, plus passionné, de nature plus indépendante, aurait [trouvé] Louis toujours fort soumis et dévoué à Napoléon; il lui aurait révélé les infamies qu'on débitait contre Napoléon et Hortense, et que Napoléon-Charles passait pour leur fils. Louis se révolta, et, n'étant pas de force à lutter, devint hypocondriaque. Puis Lucien, sa vengeance satisfaite, quitta Paris (12 avril 1804), rompant toute relation avec Napoléon...» (Pariset, 1921, p.213)] écrivit d'Angleterre à Sa Sainteté une lettre où l'on remarque ces passages:
« Permettez-moi de féliciter du fond du cœur Votre Sainteté sur son heureuse et tardive délivrance, pour laquelle nous n'avons cessé de faire des vœux ardens depuis que la persécution nous a éloigné de l'asile dont nous jouissions sous votre protection paternelle... Quoique persécuté injustement par l'empereur Napoléon, le coup du ciel qui vient de le frapper ne peut pas m'être indifférent. Voici depuis dix ans le seul moment où je me sens encore son frère. Je lui pardonne, je le plains, et je fais des vœux pour qu'il rentre enfin dans le giron de l’Église, et qu'il acquière des droits à l'indulgence du Père des miséricordes et aux prières de son vicaire... Sur le point de partir de cette heureuse Angleterre, où j'ai eu une captivité longue, mais douce et honorable, je prie Votre Sainteté de m'accorder, à ma femme et à nos enfans, ses bénédictions, en attendant que nous puissions les recevoir en personne, prosternés à ses pieds. De Votre Sainteté, le très-dévoué fils, etc.».» (Artaud, 1839, p.83-84)

« ... quant au Pontife, il continuoit son glorieux voyage. Cependant il devoit éprouver quelques retards. A Paris, il s'étoit fait une immense révolution, à la suite de l'occupation de cette ville. Le gouvernement provisoire prit le 2 avril [1814] l'arrêté suivant:
« Le gouvernement provisoire, instruit avec douleur des obstacles qui ont été mis au retour du Pape dans ses États, et déplorant cette continuation des outrages que Napoléon Bonaparte a fait subir à Sa Sainteté, ordonne que tout retardement à son voyage cesse à l'instant, et qu'on lui rende dans toute la route les honneurs qui lui sont dus. Les autorités civiles et militaires sont chargées de l'exécution du présent arrêté.» Le vice-roi [le prince Eugène] traita le Pape avec un grand respect, et lui facilita les moyens de se rendre à Parme [Le prince Eugène n'étoit désagréable à personne, et la manière dont il avoit fait traiter le Pape, lorsqu'il revenoit de France en 1814, étoit toujours présente au souvenir de Pie VII. (Artaud, id., p.150)], d'où il passa à Césène. Ce fut là que le Pontife donna une nouvelle preuve de la beauté, de la générosité de son ame. Il suffit de raconter ce trait dont l'antiquité n'a pas laissé d'exemple. Dans cette ville, le roi Joachim Murat demandoit à présenter ses hommages au Pape Pie VII, et il fut admis sur-le-cbamp à l'audience de Sa Sainteté. Après les premiers complimens, Joachim fit entendre qu'il ignoroit le but du voyage du Pape, — « Mais nous allons à Rome, répondit Pie VII; pouvez-vous l'ignorer? — Comment Votre Sainteté se détermine-t-elle ainsi à partir pour Rome? — Il semble que rien n'est plus naturel. — Mais Votre Sainteté veut-elle y aller malgré les Romains ? — Nous ne vous comprenons pas. — Des principaux seigneurs de Rome et de riches particuliers de la ville m'ont prié de faire passer aux puissances alliées un mémoire signé d'eux, dans lequel ils demandent à n'être gouvernés désormais que par un prince séculier. Voici ce mémoire, j'en ai envoyé à Vienne une copie; j'ai gardé l'original, et je le mets sous les yeux de Votre Sainteté, pour quelle voie les signatures.» A ces mots, le Pape prit des mains de Joachim le mémoire qu'il lui présentoit, et sans le lire, même sans le regarder, il le jeta dans un brasier qui se trouvoit là, et qui le consuma à l'instant; puis il ajouta: « Actuellement, n'est-ce pas, rien ne s'oppose à ce que nous allions à Rome? Ensuite, sans humeur, sans colère, sans un ton d'insulte, il congédia celui qui avoit envové de Naples, en 1809, des troupes pour assurer l'enlèvement. Ce trait d'un chrétien, d'un souverain clément, d'un politique, si l'on veut; ce trait sans aucune préparation, sans aucun sentiment d'ostentation orgueilleuse, que l'on a su par Joachim lui-même; ce pardon si promptement accordé aux plus dangereux de ses sujets et la naïveté des conséquences que le Pontife en tire pour un prompt retour à Rome, effrayèrent Joachim, qui n'étoit pas désintéressé dans cette affaire, s'il avoit, comme on le dit, sollicité les signatures apposées au bas de ce mémoire, et il n'osa pas apporter d'obstacles à la continuation du voyage triomphal du Pape.» (Artaud, id., p.81-83).

« Le 30 avril [1814], le Pape écrivit de Césène à Sa Majesté Louis XVIII. Après des félicitations, le Saint Père s'exprime en ces termes:
« L'évêque de Troyes (M. de Boulogne), connu par sa piété, est chargé expressément par nous de faire connoître à Votre Majesté les blessures que, dans la Constitution du sénat, on fait à la religion et à l'Église. Sire, les royaumes de la terre sont passagers [transitori], le seul royaume des cieux ne finit pas. Nous vous prions d'ouvrir les yeux avant de signer une telle Constitution... Après vous avoir recommandé les intérêts de la religion, nous nous croyons dans l'obligation de vous recommander les États de la sainte Église. Que ce qui est à César soit à César, que ce qui est à Dieu soit à Dieu ! Les hautes puissances alliées, avec l'applaudissement du monde entier, paroissent animées de cet esprit, et nous attendons d'elles nos États, malgré les obstacles que pourra susciter celui (Joachim) qui occupe en ce moment notre capitale et la plus grande partie de nos antiques domaines.» Pie VII arriva le 12 mai [1814] à Ancône, et fut reçu avec des transports indicibles de joie. Une foule de marins habillés uniformément, dételèrent les chevaux de sa voiture, y attachèrent des cordes de soie rouges et jaunes, et la traînèrent au mileu des cris d'allégresse. On entendoit l'artillerie des remparts, et le son des cloches de toutes les églises. Il descendit sur la place Saint-Augustin, donna la bénédiction, du haut d'un arc triomphal, de là passa à la loge des marchands, d'où il bénit la mer; puis il alla loger au Palais Pichi, où il resta jusqu'au 14. Le 13 il couronna, dans la cathédrale, l'image de la Vierge sous le titre de Regina Sanctorum omnium. Le 14, il partit pour Osimo; une garde d'honneur, vêtue de rouge, l'escorta jusqu'à Lorette. Dans son voyage, il ordonna d'accueillir avec bienveillance madame Laetitia, qui venoit demander un asile à Rome, et le cardinal Fesch qu'il traita avec une bonté particulière. Au moment où il apprit que le cardinal Fesch approchoit, le Pape dit: « Qu'il vienne, qu'il vienne; nous voyons encore ses grands-vicaires accourir à Grenoble au-devant de nous: Pie VII ne peut pas oublier le ton de courage avec lequel on a prêté le serment prescrit par Pie IV.».» (Artaud, id., p.84-85).

« [1818] M. Lucien vouloit quitter Rome, où il s' étoit réfugié à la suite d'une tentative qu'avoit faite un chef de brigands pour s'emparer de sa personne et demander une rançon. M. Lucien désiroit avec raison se rendre à Bologne; mais l'ambassadeur d'Autriche, M. de Kaunitz, y mettoit opposition. Le Saint Père dit doucement au cardinal Consalvi, que cette sévérité contre M. Lucien provenoit peut-être de quelque partialité que manifestoit Son Eminence, qui, dans toutes les circonstances, essayoit de le protéger. Mais on alloit entretenir le Saint Père d'une autre demande relative au chef de la famille Bonaparte. Le cardinal Fesch se rendit au commencement de mai à l'audience du cardinal Consalvi, pour lui annoncer que Napoléon et les personnes qui l'accompagnoient à l'île Sainte-Hélène s'afïligeoient de ne pas avoir de prêtre catholique, et sollicitoient la protection du Saint Père, pour obtenir qu'un ecclésiastique de notre religion leur fut envoyé. On demandoit surtout que Sa Sainteté instruisît promptement de ce désir le gouvernement britannique. Le Pape ordonna avec le plus grand empressement de commencer à cet égard les démarches convenables, et de les suivre avec toute l'insistance propre à les faire réussir. Le Saint Père dit alors des paroles remplies de charité, de bonté et de généreux intérêt, dont nous verrons l'effet plus tard.» (Artaud, id., p.207-208).

« La famille Bonaparte, réfugiée près du Saint Siège, témoignoit quelque joie de voir arriver l'empereur François Ier. Dernièrement, elle avoit éprouvé un chagrin qui cependant étoit inévitable. M. le cardinal Fesch, consulté sur le choix de l’ecclésiastique qui pouvoit être envoyé à Sainte-Hélène, désignoit M. l'abbé Félici; mais des renseignemens sur son caractère, qu'on avoit demandés à l'archevêque de Florence, qui connoissoit beaucoup M. Félici, ayant été peu satisfaisans, les pouvoirs du Saint Siège furent rétirés à cet ecclésiastique. Pie VII ordonna que sur-le-champ on en choisît un autre. Il se présenta un prêtre nommé Bonavita, presque octogénaire, qui demanda la faveur d'être préféré. Il étoit placé dans la maison Borghèse, et d'origine corse. Les informations prises sur sa conduite et sa moralité ayant été de tout point favorables, le Pape le substitua à M. l'abbé Félici, et lui ordonna de partir pour sa destination. Le courage de cet ecclésiastique, d'une santé peu forte et d'un âge si avancé, fut loué par tous ceux qui le virent entreprendre un si long voyage [1819].» (Artaud, id., p.225-226).

« [1821] Lorsque Pie VII apprit la mort de Napoléon, il montra le même esprit qui l'avoit porté à prier le cabinet britannique d'adoucir la captivité du grand guerrier, et il permit qu'un service funèbre fût célébré à Rome par les soins du cardinal Fesch. Le Pape dit encore, à cette occasion, plusieurs de ces mots consolans et tendres qui caractérisoient sa belle ame. Nous voyons ici disparoître la grande figure de Napoléon. Pie VIl demandoit avec avidité à connoitre les détails relatifs à la mort de celui qu'il espéroit avoir rendu à Dieu. Le Pape avoit franchement pardonné, et les assurances de bienveillance qu'il envoyoit à Sainte-Hélène ne devoient pas peu contribuer à réveiller, dans l’esprit de Napoléon, ces anciens sentimens de religion dont nous l'avons trouvé quelquefois animé. (Tom. II, pag. 190.) Ces sentimens alors étoient tels, que Pie VII, qui savoit attendre, lui disoit avec douceur: « Vous y viendrez. » Et Napoléon pouvoit-il ignorer que sa mère, trois de ses frères, une de ses sœurs recevoient à Rome une constante hospitalité! pouvoit-il ne pas s'en souvenir, lui qui aimoit sa famille, et qui peut-être l'a trop aimée ! » (Artaud, id., p.262).

« La maladie de Napoléon ne commença que le 17 mars 1821. Ce même jour, l'abbé Bonavita repartoit pour l'Europe, laissant auprès de l'empereur un autre ecclésiastique, M. l'abbé Vignali, que l'on traitoit avec déférence. Cet ecclésiastique, qui avoit remarqué dans Napoléon le progrès des sentimens religieux, méritoit et avoit obtenu la confiance la plus secrète du Saint Siège. Le 2 avril, un domestique annonça qu'on avoit découvert, la nuit, une comète vers l'Orient: « Une comète ! s'écria Napoléon, avec vivacité, ce fut le signe précurseur de la mort de César.» Le César Gaulois se croyoit averti; mais il vouloit se disposer à la mort autrement qu'un païen. Le 21 avril, il fit appeler M. Vignali, et lui dit: « Je suis né dans la religion catholique: je veux remplir les devoirs qu’elle impose, je veux recevoir les secours qu’elle administre.» » (Artaud, id., p.266).

L'abbé mourra: « Il y eut une petite fête domestique au Quirinal, le 14 mars [1823], jour où le Pape entra dans la vingt-quatrième année de son pontificat. M. de Chateaubriand qui étoit ministre des affaires étrangères depuis le 22 décembre de l'année 1822, entretenoit la plus parfaite intelligence entre le Saint Siège et le roi; la personne et les talens de ce ministre étoient appréciés à Rome. Les relations n'avoient jamais été plus tendres et plus amicales; il envoyoit au cardinal des consultations sur sa maladie, et des déclarations de médecins que lui avoit démandées l'ambassadeur. En même temps on sollicitoit la préconisation de M. de La Fare. Ce prélat fut nommé cardinal le 16 mai. Deux jours auparavant le Pape écrivit au roi.

         «
Très-cher fils en Jésus-Christ, salut et bénédiction apostolique.

 L'ambassadeur de Votre Majesté nous a présenté la lettre qu'elle nous a écrite le 23 avril, et qui contient les plus amples témoignages des services rendus à l'Eglise en France, par M. l'archevêque de Sens, de son zèle pour le bien de la religion... Votre Majesté nous a manifesté le désir de nous voir le récompenser par l'honneur de la pourpre, dans l'objet de le mettre en état de rendre à l'Eglise des services encore plus étendus et signalés... Nous avons la satisfaction de vous annoncer que dans le premier consistoire qui se tiendra le 16 du courant, le désir de Votre Majesté sera satisfait. En recommandant toujours plus à Votre Majesté toutes les Eglises de son heureux royaume, nous vous accordons, avec la plus paternelle affection, la bénédiction apostolique. Donné à Rome près Sainte-Marie-Majeure, le 14 du mois de mai de l'an 1823, de notre Pontificat le vingt-quatrième.
                                  PIUS. PP. VII.»

Sur l'original, le mot Pius est écrit très-lisibleinent; mais les autres lettres, PP. VII, sont confuses et à peine lisibles. Le consistoire eut lieu le 16 mai. M. de La Fare fut préconisé, ainsi que dom Placide Zurla, moine camaldule, savant célèbre. Si d'un côté, la santé du cardinal Consalvi commençoit à se rétablir, de l'autre, celle du Pape s'affoiblissoit chaque jour. Le 6 juillet, le Saint Père s'étoit promené en voiture, il avoit même marché un peu pour prendre de l'exercice. Le soir il congédia son service, puis s'entretint avec son auditeur. Ensuite Sa Sainteté étoit restée seule, malgré les recommandations du cardinal Consalvi qui supplioit les camerieri de ne jamais laisser leur maître sans qu'il se trouvât quelqu'un auprès de lui. Ce soir là, il voulut se lever dans son fauteuil, en s'appuyant d'une main sur son bureau, et de l'autre en cherchant un appui sur un cordon attaché à la muraille et disposé à cet effet; mais s'étant soulevé avec peine, le Saint-Père ne put atteindre ce cordon, et il tomba sur le carreau de marbre, entre la table et le fauteuil. La tête ne porta pas: le côté gauche seul souffrit de tout le poids de sa chute. A ses cris on arriva, on le plaça sur son lit, et à la première visite, les chirurgiens déclarèrent que le col du fémur étoit cassé. La nuit le malade fut agité, mais sans fièvre. Cet accident avoit eu lieu le jour de l'anniversaire du fatal enlèvement du 6 ou 7 juillet 1809. Les médecins ordonnèrent de cacher au malade l'état de fracture; cependant il demanda lui-mêm le viatique. Une catastrophe horrible devoit encore effrayer les Romains. La nuit du 15 au 16 juillet, la célèbre église de Saint-Paul hors des murs, dont Pie Vll avoit tant d'années habité le couvent, devint la proie des flammes. L'incendie se déclara à une heure après minuit; déjà à six heures la magnifique charpente en bois de cèdre, que quinze siècles avoient respectée, étoit dévorée par le feu. On voyoit amoncelée, parmi les ruines embrasées, une partie des 120 colonnes qui soutenoient les nefs de ce temple, un des plus imposans, des plus vastes et des plus riches monumens de l'univers. On attribua cet incendie à la négligence d'un ouvrier qui travailloit sur le toit de l'édifice, à réparer les plombs des canaux pour l'écoulement des eaux. Cet homme laissa tomber, sans l'apercevoir, un charbon allumé, d'un réchaud nécessaire à son ouvrage.» (Artaud, id., p.281-283).

« Louis XVIII fit expédier de Paris, sur la demande de l'ambassadeur, un de ces lits mécaniques que l'on venoit d'inventer en France, et qui permettent de soulever un blessé sans le tourmenter. Lorsque M. de Chateaubriand entretint le roi de cette demande, ce prince, qui connoissoit les souffrances et savoit compatir à celles des autres, s'occupa lui-même des détails relatifs à la structure de ce lit. Le 12 août le peuple de Rome vit avec étonnement et avec une profonde sensibilité entrer, par la porte du Peuple, une voiture sciée en deux parties, dont on avoit enlevé toute la partie droite pour y placer le lit mécanique envoyé au Pape. Le courrier du cabinet, chargé en même temps des dépêches, étoit assis dans l'autre partie conservée de la voiture, où on lui avoit ménagé un siège mal abrité. Dès que le malade fut placé sur ce lit, il ressentit du soulagement. Il ordonna que l'on remît au courrier cent doppie d'or, demanda un peu de nourriture, et prit son chocolat accoutumé. On lui parla de la douleur de Rome; il répondit par le signe de la bénédiction, et parvint à s'endormir. Le lendemain il se trouva mieux. Il pria ceux qui l'entouroient de s'entretenir devant lui des événemens ordinaires de la ville. Quelques personnes ayant nommé le vieux chevalier Italinsky, ministre de Russie, qui étoit venu dans les antichambres du palais, le Pape dit qu'il aimoit beaucoup ce ministre, et il répéta les mêmes paroles quelque temps après au cardinal Consalvi. Le malade fut assez tranquille le 18, mais, le 19, les symptômes les plus graves se déclarèrent: le Pape prononçoit vaguement les mots de Savone et Fontainebleau. Bientôt la voix s'altéra; et, à quelques sons de paroles latines, on reconnut qu'il étoit constamment en prières. Les églises se remplissoient de personnes pieuses. Il régnoit un sentiment de regret universel. Il n'y avoit, écrivoit l'ambassadeur, aucune apparence de mauvais esprit, ni d'autre agitation que celle de la douleur. Le soir, il ne fut plus possible au malade de prendre la moindre nourriture, et le 20 août, à cinq heures du matin, cette vie si pure, si sage, si forte dans beaucoup de circonstances, devoit s'éteindre. Ainsi mourut le souverain Pontife Pie VII, à l'âge de quatre-vingt-un ans et six jours, après un règne de vingt-trois ans cinq mois et six jours.» (Artaud, id., p.284-286).
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